Pourquoi et comment mesurer son tirant d’air?

19 septembre 2019

Les marins prêtent beaucoup d’attention à ce qui se passe sous la surface, mais ils ont moins l’idée de lever les yeux, or c’est un paramètre à ne pas négliger !

Lorsque les grands voiliers ont remonté l’estuaire de la Seine pour se rendre à l’Armada 2019, les plus majestueux d’entre eux ont profité de la rosée du matin pour franchi le pont de Tancarville. A ce moment là, le métal rétracté par la fraîcheur faisait gagner à l’ouvrage, les 40 cm manquants… Même si la mâture de nos bateaux, est plus modeste, il n’en reste pas moins nécessaire de regarder ce qui se passe au dessus de nos têtes, d’autant que les hauteurs mentionnées sur les cartes ne prennent pas toutes en compte la même base ! Mais de quoi parlons-nous ? Le tirant d’air est la hauteur maximale des superstructures ou du mât d’un bateau au dessus de sa ligne de flottaison. Nous verrons plus loin qu’il est des cas où cette simple mesure verticale n’est pas suffisante et que la hauteur à l’aplomb des bordés peut également avoir son importance.

1. Ça peut coincer !

En mer, à première vue, le seul risque d’un grand tirant d’air paraît être celui de chatouiller le ventre des mouettes, or, les embarras aériens peuvent être plus sérieux et prendre d’autres formes. On pense bien sûr aux quelques ponts qui relient les îles de Noirmoutier, de Ré ou d’Oléron au continent, mais de nombreux ports ou bassins sont abrités au fond d’estuaires traversés par des ponts, des viaduc, ou plus insidieux, par des lignes électriques. Sans même envisager de passer d’une mer à l’autre par les canaux, la moindre incursion fluviale implique de se conformer au gabarit de la voie d’eau concernée. De même, au moment de caler votre bateau sur son camion, le transporteur vous posera la question de ses dimensions, or si l’on connaît bien le tirant d’eau, l’encombrement de la partie émergée nous est rarement connu.

2. Ça passe ?

Les cartes marines indiquent les hauteurs libres en se référant généralement aux plus hautes eaux connues. Le chiffre indiqué est donc un minimum auxquels il conviendra d’ajouter la variation en fonction de la marée. Sauf à connaître parfaitement le site, on appliquera un généreux « chapeau de pilote » à ses calculs, surtout dans le cas de lignes haute-tension, où une marge de 3 mètres doit être respectée pour éviter l’amorçage d’un arc électrique. Grâce à des ponts levants ou ouvrants, les accès fluviaux par les principaux estuaires sont possibles pour de très grands tirants d’air : ainsi, on rallie Bordeaux, Nantes, Rouen, mais aussi Redon ou Marans avec un voilier mâté.

3. Pont des Soupirs !

En revanche, le convoyage fluvial Manche-Atlantique par le Canal d’Ille et Rance ou Atlantique-Méditerranée par les Canal des 2 mers, impose de se conformer au gabarit de la voie d’eau, défini par le pont le plus bas et le plus étroit du parcours. Ces limites sont parfois délicates à estimer dans le cas des ponts arrondis du Canal du Midi. Il est alors important de connaître non seulement le tirant d’air dans l’axe du bateau, mais aussi au niveau des balcons ou des main-courantes. Certains ponts sont extrêmement bas, comme sur le Canal d’Ille et Rance, entre Dinan et Rennes en Bretagne. La marge y est tellement étroite que les éclusiers doivent souvent ajuster le niveau du plan d’eau pour débloquer la situation. Raison de plus pour vous munir auparavant des cartes de la voie d’eau concernée auprès de la librairie fluviale.

Il est très possible que ces considérations de marin d’eau douce vous soient étrangères… Gardez pourtant à l’esprit qu’un jour, vous aurez peut-être à revendre votre bateau et que l’acquéreur pourraient avoir des envies et des priorités différentes des vôtres…

4. Double décamètre !

Voile ou moteur, on voit qu’il est important de connaître précisément les dimensions de son bateau, or les mesures indiquées sur les documentations commerciales, quand elles existent sont rarement précises, d’autant que ces caractéristiques ont pu varier par l’ajout d’antennes ou d’aériens. Le plus sûr, à moins que le bateau ne fasse partie d’une série bien connue, est de prendre vos propres mesures. On pourra profiter d’un passage à sec en chantier, mais aussi procéder à flot, tout simplement en hissant l’extrémité d’un décamètre en tête de mât et en ajoutant à ce chiffre, tout ce qui dépasse de la poulie et la distance entre pied de mât et flottaison. Celle-ci se mesurera sans trop de difficulté en plaçant un tasseau (ou un tangon) transversalement au bateau.

L’article est rédigé par Olivier Chauvin.

0 commentaires

Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *