Mais pourquoi diable, nous autres marins et aviateurs, nous obstinons-nous à utiliser des unités de mesure étranges et que nous seuls maitrisons ? Par quel snobisme refusons-nous le kilomètre si usuel et universellement pratiqué ? Tout simplement parce que le mètre et ses multiples, sont issus d’une pure convention humaine datant de la Révolution française et qu’au contraire du mile marin, ils n’ont pas de relation évidente avec la réalité physique et géographique, telle qu’elle est représentée sur les cartes.
Sommaire
1 – Mille à la minute !
2 – En pratique !
3 – Bateau, poisson puis GPS…
1. Mille à la minute !
Lorsque les cartographes ont aplati le globe terrestre pour mieux le représenter, ils ont tracé les méridiens et les parallèles qui sont autant de repères de localisation. Entre les pôles et l’équateur, des parallèles ont été définis et repérés en degrés pour chaque hémisphère. Ces degrés se divisent en minutes. Or, une minute d’arc en latitude sur le globe terrestre représente 1852 mètres, et c’est cet intervalle qui a été pris comme étalon du mille marin. Ce chiffre est une moyenne : la terre n’est pas parfaitement ronde et sa projection sur une surface plane crée des déformations significatives. Cette mesure apporte une précision suffisante pour la navigation, même si, dans l’Histoire, certains pays ont voulu affiner le calcul au prétexte de chipoter les limites de leurs eaux territoriales à leurs voisins.
2. En pratique !
Sur une carte marine, quelle que soit son échelle, les latitudes sont représentées par des graduations sur le bord vertical de la carte. Chacune d’elles (par ailleurs subdivisées en dixièmes) représente un mille marin. Une référence pratique pour mesurer les distances en reportant ce mille entre deux points de la carte, autant de fois que nécessaire, à l’aide d’un compas à pointes sèches. Cette référence est d’autant plus juste que la mesure est prise à la latitude où l’on navigue : la déformation induite par la représentation plane du globe terrestre, fait que le mille est graphiquement plus long au fur et à mesure que l’on s’éloigne de l’équateur. Depuis l’avènement du GPS et des traceurs de cartes, on se dispense le plus souvent du compas à pointes sèches, (qui raye les écrans), mais le principe et la référence restent identiques.
3. Bateau, poisson puis GPS…
Le mille est donc une mesure de distance logique, mais il restait pour les marins des temps pré-électroniques, à estimer leur vitesse, et donc la distance parcourue en un temps donné. Pour ce faire, le seul instrument a longtemps été le loch à bateau : une planchette triangulaire et lestée, que l’on filait à l’arrière, dans le sillage du navire, au bout d’une ligne portant des nœuds à intervalles réguliers. Le matelot comptait le nombre de nœuds qui filaient durant un temps donné et annonçait ainsi la vitesse avec une précision très correcte. Dans son édition de 1976, le Nouveau cours de navigation des Glénans proposait de réaliser un tel appareil en espaçant les nœuds de 7,71 mètres (soit 1/240ème de mille), et de faire le décompte sur 15 secondes (1/240ème d’heure). Le temps et la distance respectant la même proportion, la vitesse annoncée en nœuds, correspond au nombre de milles parcourus en une heure. Bien que relativement précis, ce procédé ne donnait que des mesures ponctuelles. Il a été suivi par le loch à poisson, une sorte de torpille à hélice que l’on remorquait au bout d’un filin relié à un compteur.
L’électronique et désormais, le positionnement par satellite ont coupé court aux fastidieuses manipulations, mais nous continuons à filer les nœud, comme aux temps de la marine en bois. Plus question de le faire à la main, les vitesses atteintes, sont parfaitement incompatibles avec cet exercice, même à la voile où les vitesses à deux chiffres sont désormais courantes. Avec les foils et les bateaux volants, il y a fort à parier que la course au large nous apporte bientôt des chiffres encore difficilement imaginables. Pourtant, le record absolu de vitesse sur l’eau a 41 ans ! Il a été établi en 1978 par l’australien Ken Warby à bord de Spirit of Australia. En octobre 1978, il a atteint les 276 nœuds (511,13 km/h !) sur le lac du Blowering Dam. Un record qui tient toujours !
L’article est rédigé par Olivier Chauvin.
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